Publié le 14 mars 2020 par Pierre Paquette
Les Sumériens avaient un système de notation des nombres bien particulier. Ce peuple, qui vivait en Mésopotamie (essentiellement l’Irak moderne) il y a quelque 3 900–6 500 ans, a inventé l’écriture et les mathématiques — ces dernières probablement avant la première. Pour écrire les mots comme les nombres, ils utilisaient des calames, qui consistaient en une tige de roseau taillée au couteau, qu’ils pressaient dans des plaquettes d’argile habituellement grandes comme la paume d’une main. Cela donnait des petites encores de forme de coins ou clous — cuneus en latin, d’où le nom d’écriture cunéiforme. Cela pouvait donner par exemple 𒀭𒈾𒊏𒄠𒀭𒂗𒍪, que les assyriologues transcrivent DNa-ra-am DSîn, qui est le nom d’un roi akkadien (Naram-Sin ; v. 2254–2218 AÈC).*
Le système de calcul a ceci de particulier qu’il a une double base, soit 10 et 60. Ainsi, les chiffres sont notés avec des symboles distincts pour 1 à 9 (avec déjà un ancêtre du zéro à partir d’une certaine époque, noté comme un vide entre deux nombres), mais les dizaines ne sont notées que jusqu’à la sixième, soit 60. Ce système est appelé notation sexagésimale (base 60). On a donc la progression suivante :
1 = 𒁹 | 26 = 𒎙𒐋 | 51 = 𒐐𒁹 | 76 = 𒁹𒌋𒐋 | 101 = 𒁹𒐏𒁹 | 126 = 𒈫𒐋 | 151 = 𒈫𒌍𒁹 | 176 = 𒈫𒐐𒐋 |
2 = 𒈫 | 27 = 𒎙𒑂 | 52 = 𒐐𒈫 | 77 = 𒁹𒌋𒑂 | 102 = 𒁹𒐏𒈫 | 127 = 𒈫𒑂 | 152 = 𒈫𒌍𒈫 | 177 = 𒈫𒐐𒑂 |
3 = 𒐈 | 28 = 𒎙𒑄 | 53 = 𒐐𒐈 | 78 = 𒁹𒌋𒑄 | 103 = 𒁹𒐏𒐈 | 128 = 𒈫𒑄 | 153 = 𒈫𒌍𒐈 | 178 = 𒈫𒐐𒑄 |
4 = 𒐉 | 29 = 𒎙𒑆 | 54 = 𒐐𒐉 | 79 = 𒁹𒌋𒑆 | 104 = 𒁹𒐏𒐉 | 129 = 𒈫𒑆 | 154 = 𒈫𒌍𒐉 | 179 = 𒈫𒐐𒑆 |
5 = 𒐊 | 30 = 𒌍 | 55 = 𒐐𒐊 | 80 = 𒁹𒎙 | 105 = 𒁹𒐏𒐊 | 130 = 𒈫𒌋 | 155 = 𒈫𒌍𒐊 | 180 = 𒐈 |
6 = 𒐋 | 31 = 𒌍𒁹 | 56 = 𒐐𒐋 | 81 = 𒁹𒎙𒁹 | 106 = 𒁹𒐏𒐋 | 131 = 𒈫𒌋𒁹 | 156 = 𒈫𒌍𒐋 | 181 = 𒐈𒁹 |
7 = 𒑂 | 32 = 𒌍𒈫 | 57 = 𒐐𒑂 | 82 = 𒁹𒎙𒈫 | 107 = 𒁹𒐏𒑂 | 132 = 𒈫𒌋𒈫 | 157 = 𒈫𒌍𒑂 | 182 = 𒐈𒈫 |
8 = 𒑄 | 33 = 𒌍𒐈 | 58 = 𒐐𒑄 | 83 = 𒁹𒎙𒐈 | 108 = 𒁹𒐏𒑄 | 133 = 𒈫𒌋𒐈 | 158 = 𒈫𒌍𒑄 | 183 = 𒐈𒐈 |
9 = 𒑆 | 34 = 𒌍𒐉 | 59 = 𒐐𒑆 | 84 = 𒁹𒎙𒐉 | 109 = 𒁹𒐏𒑆 | 134 = 𒈫𒌋𒐉 | 159 = 𒈫𒌍𒑆 | 184 = 𒐈𒐉 |
10 = 𒌋 | 35 = 𒌍𒐊 | 60 = 𒁹 | 85 = 𒁹𒎙𒐊 | 110 = 𒁹𒐐 | 135 = 𒈫𒌋𒐊 | 160 = 𒈫𒐏 | 185 = 𒐈𒐊 |
11 = 𒌋𒁹 | 36 = 𒌍𒐋 | 61 = 𒁹𒁹 | 86 = 𒁹𒎙𒐋 | 111 = 𒁹𒐐𒁹 | 136 = 𒈫𒌋𒐋 | 161 = 𒈫𒐏𒁹 | 186 = 𒐈𒐋 |
12 = 𒌋𒈫 | 37 = 𒌍𒑂 | 62 = 𒁹𒈫 | 87 = 𒁹𒎙𒑂 | 112 = 𒁹𒐐𒈫 | 137 = 𒈫𒌋𒑂 | 162 = 𒈫𒐏𒈫 | 187 = 𒐈𒑂 |
13 = 𒌋𒐈 | 38 = 𒌍𒑄 | 63 = 𒁹𒐈 | 88 = 𒁹𒎙𒑄 | 113 = 𒁹𒐐𒐈 | 138 = 𒈫𒌋𒑄 | 163 = 𒈫𒐏𒐈 | 188 = 𒐈𒑄 |
14 = 𒌋𒐉 | 39 = 𒌍𒑆 | 64 = 𒁹𒐉 | 89 = 𒁹𒎙𒑆 | 114 = 𒁹𒐐𒐉 | 139 = 𒈫𒌋𒑆 | 164 = 𒈫𒐏𒐉 | 189 = 𒐈𒑆 |
15 = 𒌋𒐊 | 40 = 𒐏 | 65 = 𒁹𒐊 | 90 = 𒁹𒌍 | 115 = 𒁹𒐐𒐊 | 140 = 𒈫𒎙 | 165 = 𒈫𒐏𒐊 | 190 = 𒐈𒌋 |
16 = 𒌋𒐋 | 41 = 𒐏𒁹 | 66 = 𒁹𒐋 | 91 = 𒁹𒌍𒁹 | 116 = 𒁹𒐐𒐋 | 141 = 𒈫𒌋𒁹 | 166 = 𒈫𒐏𒐋 | 191 = 𒐈𒌋𒁹 |
17 = 𒌋𒑂 | 42 = 𒐏𒈫 | 67 = 𒁹𒑂 | 92 = 𒁹𒌍𒈫 | 117 = 𒁹𒐐𒑂 | 142 = 𒈫𒌋𒈫 | 167 = 𒈫𒐏𒑂 | 192 = 𒐈𒌋𒈫 |
18 = 𒌋𒑄 | 43 = 𒐏𒐈 | 68 = 𒁹𒑄 | 93 = 𒁹𒌍𒐈 | 118 = 𒁹𒐐𒑄 | 143 = 𒈫𒌋𒐈 | 168 = 𒈫𒐏𒑄 | 193 = 𒐈𒌋𒐈 |
19 = 𒌋𒑆 | 44 = 𒐏𒐉 | 69 = 𒁹𒑆 | 94 = 𒁹𒌍𒐉 | 119 = 𒁹𒐐𒑆 | 144 = 𒈫𒌋𒐉 | 169 = 𒈫𒐏𒑆 | 194 = 𒐈𒌋𒐉 |
20 = 𒎙 | 45 = 𒐏𒐊 | 70 = 𒁹𒌋 | 95 = 𒁹𒌍𒐊 | 120 = 𒈫 | 145 = 𒈫𒌋𒐊 | 170 = 𒈫𒐐 | 195 = 𒐈𒌋𒐊 |
21 = 𒎙𒁹 | 46 = 𒐏𒐋 | 71 = 𒁹𒌋𒁹 | 96 = 𒁹𒌍𒐋 | 121 = 𒈫𒁹 | 146 = 𒈫𒌋𒐋 | 171 = 𒈫𒐐𒁹 | 196 = 𒐈𒌋𒐋 |
22 = 𒎙𒈫 | 47 = 𒐏𒑂 | 72 = 𒁹𒌋𒈫 | 97 = 𒁹𒌍𒑂 | 122 = 𒈫𒈫 | 147 = 𒈫𒌋𒑂 | 172 = 𒈫𒐐𒈫 | 197 = 𒐈𒌋𒑂 |
23 = 𒎙𒐈 | 48 = 𒐏𒑄 | 73 = 𒁹𒌋𒐈 | 98 = 𒁹𒌍𒑄 | 123 = 𒈫𒐈 | 148 = 𒈫𒌋𒑄 | 173 = 𒈫𒐐𒐈 | 198 = 𒐈𒌋𒑄 |
24 = 𒎙𒐉 | 49 = 𒐏𒑆 | 74 = 𒁹𒌋𒐉 | 99 = 𒁹𒌍𒑆 | 124 = 𒈫𒐉 | 149 = 𒈫𒌋𒑆 | 174 = 𒈫𒐐𒐉 | 199 = 𒐈𒌋𒑆 |
25 = 𒎙𒐊 | 50 = 𒐐 | 75 = 𒁹𒌋𒐊 | 100 = 𒁹𒐏 | 125 = 𒈫𒐊 | 150 = 𒈫𒌍 | 175 = 𒈫𒐐𒐊 | 200 = 𒐈𒎙 |
𒐬 = 36 000, 𒐲 = 216 000, 𒐳 = 432 000 | |||||||
À noter que l’écriture de ces nombres varie dans le temps et selon les régions. Les informations données ici sont à titre indicatif seulement. |
Les Sumériens avaient donc inventé la notation positionnelle, un système bien plus pratique que les nombres romains qui furent utilisés après l’annexion de la région par l’Empire romain en 63 AÈC. On peut donc facilement convertir un nombre sumérien en nombre moderne (utilisant les chiffres dits indo-arabes modernes) selon la formule suivante :
(A × 216 000) + (B × 3 600) + (C × 60) + (D × 10) + E
Évidemment, les Sumériens pouvaient utiliser des nombres plus grands, mais limitons-nous ici à ceux-ci.
De plus, le système était utilisé pour écrire les fractions. Outre les symboles 𒑚 (⅓), 𒑛 (⅔), 𒑢 (¼), 𒑡 (⅙), et 𒑜 (⅚), ils pouvaient simplement écrire le nombre de soixantièmes, etc. Par exemple, 𒈫𒐏𒐉, en plus de correspondre à 164, pourrait vouloir dire 20 + 44⁄60, ou même 20 + 40⁄60 + 4⁄3 600. Comment faire la différence ? En regardant le contexte ! Par exemple, on n’écrirait pas dans une recette que ça prend 𒁹𒈫 = 62 tasses de farine, mais 1 + 2⁄60 est plus vraisemblable…
Lorsque l’on transcrit des nombres cunéiformes au système moderne, la convention veut que l’on sépare les groupes de 60 par des virgules, et les fractions avec un point-virgule. On aurait donc par exemple 𒐉𒎙𒐊𒌍𒈫·𒑂𒌋𒑄𒐋𒌋𒑆 = 4,25,32;7,18,6,19 = (4 × 3 600) + (25 × 60) + 32 + 7⁄60 + 18⁄3 600 + 6⁄216 000 + 19⁄12 960 000 = 15 932,121695910493827… Ceci est une belle démonstration que les nombres cunéiformes peuvent parfois être bien plus courts que leurs équivalents modernes. (Nous avons ajouté le symbole ·, qui n’était pas utilisé par les Mésopotamiens, pour aider à séparer la portion entière de la portion fractionnelle.)
Mais pourquoi étudier les nombres cunéiformes ? Eh ! bien, c’est que nous avons indirectement hérité de ce système… quand vient le temps de mesurer des angles ou des temps ! Le fait qu’il y ait 360 degrés dans un cercle — 6 × 60 — vient des Sumériens, tout comme la division de chaque degré (°) en minutes (′, à ne pas confondre avec ' ou ’, qui ne devraient jamais être utilisés pour les minutes) et secondes (″, à ne pas confondre avec " ou ”, qui similairement ne devraient jamais être utilisés pour les secondes) d’arc — pendant un temps, les tables astronomiques indiquaient même les tierces, quartes, etc., et il subsiste des symboles pour ; à preuve, les ‴ de ce monde, bien que rares aujourd’hui. On divise aussi les heures en minutes (min sans point final ; jamais ′ pour les minutes de temps) et secondes (s sans point final ; pas sec et jamais ″ pour les secondes de temps).
Les cases ci-dessous permettent de convertir un nombre d’un système de notation à l’autre. Entrez un nombre dans une ou l’autre, et cliquez sur « Convertir » ; si un nombre se trouve dans la case « Notation sexagésimale », il sera converti en notation décimale. Si la case « Notation sexagésimale » est vide, le nombre moderne de la case de droite sera converti en notation sexagésimale.
Notation sexagésimale · · Notation décimale
Comment faisaient les Mésopotamiens pour additionner, soustraire, multiplier, ou diviser leurs nombres ? Disons que leurs mathématiques étaient pour le moins… différentes des nôtres ! Ainsi, pour additionner, c’était un peu comme notre système, sauf qu’au lieu de retenir des dizaines, centaines, etc., les Mésopotamiens retenaient des dizaines, soixantaines, etc. Exemple : 𒌍𒑄 + 𒁹𒎙𒑂 = 38 + 87 donc on additionne la dernière colonne = 𒑄 + 𒑂 = 𒌋𒐊 (8 + 7 = 15), puis l’avant-dernière colonne = 𒌍 + 𒎙 = 𒐐 (30 + 20 = 50), puis la précédente = 𒁹 (60). On ajoute ensuite les trois résultats, soit 𒁹 + 𒐐 + 𒌋𒐊 (60 + 50 + 15) = 𒁹 + 𒁹 + 𒐊 (60 + 60 + 5) = 𒈫𒐊 (125).
Pour la soustraction, même chose : on emprunte de la colonne de gauche si nécessaire. Par exemple, 𒐐𒈫 − 𒎙𒐈 (52 − 23) devient 𒐏𒑆𒐈 − 𒎙𒐈 (40.12 − 23), donc 𒐏 − 𒎙 (40 − 20) et 𒑆𒐈 − 𒐈 (12 − 3), donc 𒎙 + 𒑆 (20 + 9), et enfin 𒎙𒑆 (29).
2 · 0; 30 | 3 · 0; 20 | 4 · 0; 15 | 5 · 0; 12 |
6 · 0; 10 | 8 · 0; 7, 30 | 9 · 0; 6, 40 | 10 · 0; 6 |
12 · 0; 5 | 15 · 0; 4 | 16 · 0; 3, 45 | 18 · 0; 3, 20 |
20 · 0; 3 | 24 · 0; 2, 30 | 25 · 0; 2, 24 | 27 · 0; 2, 13, 20 |
Là où ça se complique — mais où ça devient en même temps génial — est pour la multiplication et la division. Les Mésopotamiens n’avaient pas de procédure semblable à la nôtre pour la multiplication, mais ils avaient eu l’intelligence de découvrir que ab = [(a + b)² − a² − b²] / 2 et même encore plus génial, ab = [(a + b)² − (a − b)²] / 4. Pour les divisions par 2 et par 4 et quelques autres, ils avaient des tables de réciproques, par exemple le tableau de droite. Il s’agissait donc de convertir la multiplication en additions de carrés, pour lesquels ils avaient aussi des tables de carrés de tous les nombres de 1 à 60 (on changeait la position au besoin pour les nombres plus grands) — par exemple, 𒑄 • 𒁹𒐉 pour 8² = 64, ou 𒌋𒐋 • 𒐉𒌋𒐋 pour 16² = 256 (le symbole • est notre ajout). Pour la multiplication, donc, on pouvait avoir 𒁹𒌍𒑄 × 𒐏𒑂 (98 × 47) devenir [(98 + 47)² − (98 − 47)²] / 4, donc (145² − 51²) / 4, donc (21025 − 2601) / 4, donc 18424 / 4, enfin 4606, le résultat recherché.
Enfin, pour la division, ils utilisaient l’équivalence a/b = a × (1 / b). Prenons donc 𒁹𒌍𒐊 ÷ 𒌋𒐊 (95 ÷ 15), qui devient 95 × 1⁄15, et on recourt aux tables de réciproques, de multiplications, de carrés, etc., pour trouver 6,333…, soit 6;20 ou 𒐋·𒎙 (encore une fois, nous utilisons · que les Mésopotamiens n’utilisaient pas, pour aider à la distinction de la partie entière de la partie fractionnelle).
Il est intéressant de noter que les Babyloniens avaient développé les mathématiques à un très haut point, toutes choses demeurant relatives. Ainsi, la tablette Plimpton 322 illustrée en tête de cette page, qui est un des plus anciens tableaux de trios dits pythagoriciens. Il en manque probablement une bonne partie, puisque étrangement, on ne donne pas les valeurs a, b, ou c de l’équation dite « de Pythagore », soit a² + b² = c², mais plutôt b et c de même qu’un nombre correspondant, selon ce qui manque, à c² / a² ou à b² / a² (appelons cette quantité d. Les quatre colonnes de la tablette sont donc respectivement d, b, c, et un numéro séquentiel (de la ligne).
Cunéiforme | Moderne† | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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𒐐𒑆·𒌋𒐊 | 𒁹𒐐𒑆 | 𒈫𒐏𒑆 | 𒁹 | 59 00 15 = 0,98340277777778 | 1 59 = 119 | 2 49 = 169 | 1 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐐𒐋𒐐𒐋𒐐𒑄𒌋𒐉𒐐𒐋𒌋𒐊 | 𒐐𒐋𒑂 | 𒐈𒌋𒈫𒁹 | 𒈫 | 56 56 58 14 56 15 = 0,94915855999228 | 56 07 = 3367 | 3 12 01 = 11521 | 2 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐐𒐊𒑂𒐏𒁹𒌋𒐊𒌍𒐈𒐏𒐊 | 𒁹𒌋𒐋𒐏𒁹 | 𒁹𒐐·𒐏𒑆 | 𒐈 | 55 07 41 15 33 45 = 0,91880212673611 | 1 16 41 = 4601 | 1 50 49 = 6649 | 3 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐐𒐈𒌋·𒎙𒑆𒌍𒈫𒐐𒈫𒌋𒐋 | 𒐈𒌍𒁹𒐏𒑆 | 𒐊𒑆𒁹 | 𒐉 | 53 10 29 32 52 16 = 0,88624790672154 | 3 31 49 = 12709 | 5 09 01 = 18541 | 4 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐏𒑄𒐐𒐉𒁹𒐏· | 𒁹𒐊 | 𒁹𒌍𒑂 | 𒐊 | 48 54 01 40 = 0,81500771604938 | 1 05 = 65 | 1 37 = 97 | 5 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐏𒑂𒐋𒐏𒁹𒐏· | 𒐊𒌋𒑆 | 𒑄𒁹 | 𒐋 | 47 06 41 40 = 0,78519290123457 | 5 19 = 319 | 8 01 = 481 | 6 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐏𒐈𒌋𒁹𒐐𒐋𒎙𒑄𒎙𒐋𒐏· | 𒌍𒑄𒌋𒁹 | 𒐐𒑆𒁹 | 𒑂 | 43 11 56 28 26 40 = 0,71998367626886 | 38 11 = 2291 | 59 01 = 3541 | 7 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒐏𒁹𒌍𒐈𒐐𒑆𒐈𒐏𒐊 | 𒌋𒐈𒌋𒑆 | 𒎙·𒐏𒑆 | 𒑄 | 41 33 59 03 45 = 0,6927734375 | 13 19 = 799 | 20 49 = 1249 | 8 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒌍𒑄𒌍𒐈𒌍𒐋𒌍𒐋 | 𒑆𒁹 | 𒌋𒈫𒐏𒑆 | 𒑆 | 38 33 36 36 = 0,64266944444444 | 9 01 = 541 | 12 49 = 769 | 9 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒌍𒐊𒌋·𒈫𒎙𒑄𒎙𒑂𒎙𒐉𒎙𒐋𒐏· | 𒁹𒎙𒈫𒐏𒁹 | 𒈫𒌋𒐋𒁹 | 𒌋· | 35 10 02 28 27 24 26 40 = 0,58612256611035 | 1 22 41 = 4961 | 2 16 01 = 8161 | 10 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒌍𒐈𒐏𒐊 | 𒐏𒐊 | 𒁹𒌋𒐊 | 𒌋𒁹 | 33 45 = 0,5625 | 45 = 45 | 1 15 = 75 | 11 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒎙𒑆𒎙𒁹𒐐𒐉𒈫𒌋𒐊 | 𒎙𒑂𒐐𒑆 | 𒐏𒑄𒐏𒑆 | 𒌋𒈫 | 29 21 54 02 15 = 0,48941684027778 | 27 59 = 1679 | 48 49 = 2929 | 12 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒎙𒑂·𒐈𒐏𒐊 | 𒑂𒌋𒈫𒁹 | 𒐉𒐏𒑆 | 𒌋𒐈 | 27 00 03 45 = 0,45001736111111 | 7 12 01 = 25921 | 4 49 = 289 | 13 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒎙𒐊𒐏𒑄𒐐𒁹𒌍𒐊𒐋𒐏· | 𒎙𒑆𒌍𒁹 | 𒐐𒐈𒐏𒑆 | 𒌋𒐉 | 25 48 51 35 06 40 = 0,43023882030178 | 29 31 = 1771 | 53 49 = 3229 | 14 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
𒎙𒐈𒌋𒐈𒐏𒐋𒐉 | 𒐐𒐋 | 𒐐𒐈 | 𒌋𒐊 | 23 13 46 4 = 0,38715771604938 | 56 = 56 | 53 = 53 | 15 | ||||||||||||||||||||||||||||||||||
† La première ligne de chaque rangée de la colonne « Moderne » indique la transcription directe ; la seconde indique la valeur décimale. La tablette contient des erreurs et des parties endommagées, desquelles nous n’avons pas tenu compte ici. Le consensus général est aussi qu’il manque le nombre 𒁹 (1) au début de chaque rangée de la première colonne. Nous avons aussi omis les en-têtes de colonne, qui ne sont que partiellement interprétés du babylonien. Nous suggérons l’article « Plimpton 322 is Babylonian exact sexagesimal trigonometry », de Daniel F. MANSFIELD et N.J. WILDBERGER, paru dans Historia Mathematica, Vol. 44, N° 4 (2017) : 395–419, pour une analyse plus approfondie de la tablette Plimpton 322 (en anglais). |
Prenons par exemple la septième ligne : 43 11 56 28 26 40 représente 43⁄60 + 11⁄3 600 + 56⁄216 000 + 28⁄12 960 000 + 26⁄777 600 000 + 40⁄46 656 000 000, soit 0,71998367626886 ; on a ensuite 38 11 pour 38 × 60 + 11, soit 2 291 ; et enfin 59 01 pour 59 × 60 + 1, soit 3 541 (en omettant le numéro de ligne). Les quantités b et c sont donc égales à 2 291 et 3 541, respectivement, ce qui entraîne a² = 3 541² − 2 291² = 12 538 681 − 5 248 681 = 7 290 000, donc a = 2 700 (en cunéiforme, ce serait simplement 45, pour 45 × 60). De là, on pose c² ÷ a², qui devrait nous donner la première colonne : 3 541² ÷ 2 700² = 12 538 681 ÷ 7 290 000 = 1,71998367626886. Or, la première colonne est ce nombre moins 1 (d’où le consensus du manque de caractère).
Outre le fait que nous utilisons encore des reliquats du système mathématique sumérien dans notre vie quotidienne, avec les heures, minutes, et secondes de temps ou encore les degrés, minutes, et secondes d’arc, virtuellement tous les travaux astronomiques de l’Antiquité, du Moyen Âge, et de la Renaissance utilisent une adaptation de celui-ci quand vient le temps de noter les grands nombres ou ceux ayant une partie fractionnelle. Par exemple, Nicolas Copernic, dans De Revolutionibus orbium cœlestium, dans lequel il présente son modèle héliostatique du système solaire, donne un tableau donnant le mouvement moyen de la Lune avec des valeurs notées en degrés, minutes, secondes, et tierces chaque jour pendant 60 jours — la 60e valeur étant simplement la première, multipliée par 60, soit un décalage de chaque valeur vers la gauche : ainsi, 0;59,8,7 pour une journée devient 59;8,7,22 pour 60 jours. (La lecture de l’ouvrage est difficile, puisque Copernic utilise aussi des nombres romains dans le texte courant.)
La personne qui s’intéresse le moindrement à l’histoire de l’astronomie doit connaître les mathématiques sumériennes et les systèmes qui en découlent, afin de bien comprendre les documents historiques nous ayant été légués par les Géants de l’Histoire sur les épaules desquels nous avons grimpé pour voir plus loin.
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© 2020 Astronomie‑Québec / Pierre Paquette